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Dossier – L’accord de Ouaga avait des choses pas acceptables : quand Ouattara défendait la cause des mutins (Côte d’Ivoire)

Des archives de novembre 2014 de L’intelligent d’Abidjan, montrent clairement que la Côte d’Ivoire avait déjà eu affaire aux mêmes mutins de janvier et mai 2017.

Ils avaient à l’époque réclamé le bénéfice du bail et des grades. Ils étaient presque tous des caporaux, et  sont aujourd’hui des caporaux-chefs, des sergents, aspirant désormais à devenir sergent-chefs et adjudants. Leurs problèmes semblaient avoir été définitivement résolus à cette époque, au point que depuis près de trois ans, ils étaient restés plus ou moins tranquilles jusqu’à ce mois de janvier de l’année 2017,  avec l’apparition de revendications sans doute nouvelles et pas posées sur la table en 2014. Retour sur des comptes-rendus et des déclarations passées pour mieux analyser les postures acteurs des uns et des autres, pour saisir l’ampleur des éventuels ressentiments et des soupçons pouvant animer les uns et les autres. Pour percevoir l’exaspération qui peut s’exprimer… Pour comprendre que l’histoire reste définitivement un témoignage,  et que le temps est vraiment le second nom de Dieu.
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ouattara mutinerie 201

Alassane Ouattara aux militaires en colère en Novembre 2014 : «  L’accord de Ouaga avait des choses qui n’étaient pas acceptables… »

La deuxième rencontre entre le comité interministériel et les mutins a eu lieu le jeudi 20 novembre 2014 au ministère de la défense au Plateau. Les ministres et les soldats se sont ensuite rendus au palais présidentiel pour rendre les conclusions des échanges au Président de la République Alassane Ouattara. Le chef de l’État a exprimé sa gratitude aux soldats pour avoir fait preuve de discipline en rejoignant les casernes dès que cela leur a été demandé. Il a indiqué être soucieux de l’amélioration des conditions de vie des militaires. Il a rappelé avoir en 1990 avec l’aide du Président Houphouët Boigny et du général Guéi Robert, fourni d’énormes ef- forts pour améliorer les conditions de vie de la grande muette.
« Pour moi il est important de tenir ce qui a été pris comme engagement. C’est ce que nous avons tenté de faire. L’accord de Ouaga avait des choses qui n’étaient pas acceptables. Par exemple, vos anciens commandants de zone, dès qu’ils avaient la confirmation de leurs galons devaient quitter l’armée. Vous aussi, dès confirmation de vos grades, vous deviez quitter l’armée. J’ai estimé qu’après ce que vous avez rendu comme service à la nation, vous devez continuer. C’est ce que vous êtes en train de faire. Evidemment l’accord de Ouaga n’a pas été précis sur certains points. Maintenant, ça été clarifié », a déclaré le chef de l’État.

[ Les soldats appelés à faire en sorte que les démobilisés ne manifestent pas]  

Le chef de l’État a souhaité que les ex-com- battants démobilisés n’emboîtent pas aux militaires : « En réglant vos problèmes, vous devez chaque jour vous dire que vous ap- partenez à la nation ivoirienne. Vous, res- ponsables militaires, devez être concernés par tout ce qui se passe en Côte d’Ivoire en donnant la sécurité aux Ivoiriens. Qu’est ce que j’entends ici et là. Qu’un certain nombre de démobilisés, parce qu’on va vous donner ce qui vous est dû, veulent rentrer dans la danse. C’est à vous de vous assurer que cela ne va pas arriver ».

[ Ouattara Siaka : “Nous n’avions pas d’autre choix” ]

Le porte-parole des militaires,  Ouattara Siaka a laissé entendre que lui et ses amis ne sont pas animés par la volonté de porter atteinte aux Institutions de la République : « Notre débat sur la question de l’améliora- tion de nos conditions de vie et de travail, on aurait pu les exprimer autrement si on n’avait d’autres possibilités. Ça nous écœure que nous ayons pu troubler vos sommeils. Ce n’était pas nos intentions. Il n’y avait pas d’autres méthodes. Il ne s’agit de primes de guerre ».

[ Ce qui a été décidé entre le comité interministériel et les militaires avant la rencontre chez Ouattara ]

Le président du comité interministériel le ministre d’État , ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Hamed Bakayoko a indiqué que le gouvernement et les militaires ont pu ac- corder leurs violons sur tous les points. « Nous avons eu des discussions. Nous nous sommes mis d’accord pour épurer les soldes sur une période de six mois. Ensuite nous avons abordé la question de leur avancement en grade. Nous avions eu des divergences pour arriver à un consensus, et faire en sorte que cet avancement se fasse en fonction de l’ancienneté, dunmérite et par catégorie. Il y’a deux grandes catégories. Un groupe pourrait être promu à partir du 1er janvier 2015 au grade de sergent et l’autre groupe promu à cette même date au grade de caporal-chef. Ils nous ont également parlé de certains omis. On a décidé de mettre en place un cadre de travail pour étudier le cas de ces omis afin qu’ils ne soient pas oubliés », a déclaré Hamed Bakayoko.
Il a fait savoir que le comité interministériel travaille pour apporter des solutions globales a l’amélioration des conditions de vie des soldats.
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Cherif Ousmane ("Guepard") of Forces nouvelles (former rebels), military commander of the region around the central town of Bouaké, Ivory Coast
Cherif Ousmane (“Guepard”) of Forces nouvelles (former rebels), military commander of the region around the central town of Bouaké, Ivory Coast

[ Rencontre entre ministres et militaires Chérif Ousmane et un député à la tête d’une délégation ]

Le Président de la République a mis en place un comité pour répondre aux at- tentes des militaires qui ont manifesté à Abidjan, Bouaké, Daloa et Korhogo le mardi 18 novembre. Ce comité présidé par le ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et constitué des ministres de la Défense, de l’Economie, de la Communication et du Budget ainsi que du Conseil national de sécurité, (Cns) a échangé avec les différentes délégations des mutins, à raison de dix militaires par délégation le mercredi 19 novembre 2014, au ministère de la Défense au Plateau. Avant la rencontre à huis clos, le ministre d’État Hamed Bakayoko, a indiqué qu’il s’agit pour le comité qu’il préside, de discuter avec les éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire(Frci) : « Nous venons rencontrer nos jeunes frères, les écouter, discuter avec eux afin de tomber d’accord concernant les modalités sur la base desquelles nous règlerons leurs préoccupations ».
Il a remercié les militaires pour avoir répondu à l’appel en levant tous les barrages. La délégation de Bouaké est arrivée sous forte escorte militaire avec à sa tête le commandant adjoint du Groupement de sécurité du Président de la République (Gspr) le lieutenant-colonel Cherif Ousmane. Le député de Bouaké Bema Fofana faisait partie de cette délégation. Le chef d’état-major général des Frci, le commandant supérieur de la gendarmerie et le commandant des Forces terrestres ont pris part à la réunion. Avant de mettre le cap sur le ministère de la Défense, les ministres se sont concertés au ministère de l’Intérieur.

[ Après une rencontre de trois heures 
Le message des militaires à Ouattara ]
Démarrée à 17 h 30 mn, la réunion entre le comité interministériel et les porte-paroles des militaires grévistes a pris fin, à 20h30. Au terme des échanges, le ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité a indiqué qu’il y a eu des avancées notables : « Nous avons eu une première séance. Il y’a eu des progrès. Nous allons nous rencontrer à 15 h demain (aujourd’hui jeudi 20 novembre) pour conclure ».
Le porte-parole des mutins le caporal Diabaté Inza, du 1er Bcp détaché à Abobo s’est dit satisfait de la rencontre : « Le bail est un acquis. Le retard dans les baux est un acquis. Le problème de grade également ».
Ouattara Siaka de la marine nationale, a expliqué que leur revendication n’est pas politique et a émis ce message à l’endroit du chef de l’État et des autorités : «  Nous remercions le Président de la République. Il a dit qu’il est prêt pour nous. Nous aussi, nous sommes prêts pour lui ».
Les ministres auprès du Premier ministre chargés du Budget et de l’Economie n’ont pas terminé la rencontre. Le premier a quitté la salle de réunion à 18 h 33, quand le second est parti trois minutes plus tard. Leur départ a été interprété comme un signal pour parer au plus pressé en vue de donner une réponse concrète aux aspects financiers de l’accord en vue.
Après la rencontre, Paul Koffi Koffi a poursuivi les échanges avec les grands commandements de l’armée. Ils se sont séparés finalement à 21 heures 10.

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Ahmed Bakayoko

Hamed Bakayoko aux militaires lors de la 1ère mutinerie de novembre 2014 : «  Quand tu as raison, il ne faut pas gâter ta raison »

« Je viens sur le plateau pour rassurer tout le monde. D’abord dire que le message des jeunes a été entendu. Le Président de la République les a compris. Ensuite, sa réponse quant à leurs préoccupations est positive et sans ambages. Elle est claire et nette. Je voudrais dire également aux populations que le pays est calme. Le calme est revenu. Nous allons, dès demain, dans le cadre des discussions avec les représentants de ces jeunes, travailler concrètement sur les modalités d’exécution des différentes mesures arrêtées par le Président de la République pour faire droit à leurs préoccupations.
Nous avons parlé à la plupart des jeunes. Nous avons parlé avec la plupart des jeunes, avec leurs représentants d’Abobo, de Bouaké, de Korhogo et même de Daloa. Ils ont été en contact avec les chefs de corps. Il y avait deux grandes occupations. D’abord, il y a un groupe de militaires qui sont au nombre de 575. Ils ont été recrutés, intégrés dans l’armée en 2011. Ceux-ci demandaient la prise en compte des arriérés de soldes à compter de 2009. La réponse est positive. Fin novembre, ils auront une première moitié et fin décembre ils auront l’autre moitié. Le groupe le plus important est constitué de caporaux au nombre de 8400. Ils demandaient leur prise en compte en ce qui concerne les arriérés de solde qui court à partir de 2009. La réponse est claire, nette et positive. Tout ce qui reste, c’est de voir avec eux, les modalités d’exécution.

[ Je dois vous dire que le Président n’était pas très content de savoir que cette question qui était prévue par les accords de Ouaga depuis 2009 n’ait pas été traitée et exécutée ] Donc, je voulais dire ceci aux jeunes : ‘‘vous vous êtes exprimés. Vous avez parlé. Le Président a compris. Il a donné des instructions au gouvernement pour régler vos problèmes. Comme on dit chez nous en Afrique, « quand tu as raison, il ne faut pas gâter ta raison ». Donc, le Président a compris. Comme vous le savez le Président n’a pas de positions figées. Le Président de la République a analysé la situation. Il trouve que les jeunes ont raison. Ce n’est pas normal qu’ils aient travaillé depuis 2009 et que dans le payement on ne les prenne pas en compte qu’en 2011. Évidemment par rapport au montant que ça représente, c’est juste des modalités à voir avec eux dans le cadre des discussions. D’ailleurs, je dois ajouter que nous avons apprécié que tout cela se soit fait dans le calme. Il n’y a pas eu d’agressivité. Il n’y a pas eu d’incident majeur. C’est vrai que nous regrettons une altercation qui a causé la mort d’un civil au niveau d’Anador à Abobo. Mais globalement, les militaires ont montré que ce qu’ils voulaient, c’était de se faire entendre. Ils ne voulaient pas créer le désordre, la chienlit. À Abidjan, à Abobo et dans la plupart des endroits du pays, le calme est revenu. Je voudrais les rassurer. Il y a des rumeurs qui font état de ce qu’il y aurait des sanctions. Il n’y aura pas de sanctions parce que ce qui est important, c’est que le pays avance. Pour avancer, on ne doit pas aller de péril en péril. Pour des questions d’argent, on trouvera toujours des solutions. Je pense que le fond du problème est traité. Le Président a décidé de régler ces problèmes. Ce qui est sûr pour les 8400 caporaux, dès fin novembre, ils auront déjà une première partie de ce qui leur est dû. Ensuite le reste sera discuté avec eux. On leur demande de rester raisonnables. Le président a compris le message, il a donné des instructions fermes au Gouvernement. Dès demain (ndl : mercredi 19 novembre 2014) nous allons entamer les discussions précises pour les modalités d’exécution.
La situation est parfaitement stable, le pays est calme. Il y a eu un problème comme il peut y en avoir dans tout pays. Mais dès que ça concerne des militaires, la situation prend une autre dimension.
On n’a pas assisté à un niveau de désobéissance ; il y eu vraiment une volonté de passer un message très clair que le Gouvernement a compris et que le Président de la République a compris.
Le président a dit : « Ce sont mes enfants, ils ont passé un message, j’ai donné une réponse positive et évidemment pour l’exécuter, il faut des modalités ».
Ce n’est pas quelque chose qu’on peut décider à la télévision. Ce que je peux leur dire, c’est que ce sont nos jeunes frères. Ils ont été compris, il n’y a pas de double langage. On ne peut pas construire le pays en vous mettant de côté. Et ce n’est pas la vision du Président de la République qui a décidé de régler leurs problèmes. Il a pris la question à bras le corps. C’est quelque chose qui devait être fait avant 2009 dans le cadre des l’Accord de Ouagadougou.
Nos allons apporter une réponse qui fasse en sorte que tout cela soit derrière nous et qu’ensemble, nous puissions continuer la marche de la Côte d’Ivoire. Personne ne peut les payer s’il y a la chienlit dans le pays. Ils ont besoin de stabilité pour que l’État ait les ressources nécessaires pour régler leur problème.
Nous avons compris leur message. Il ne faut pas suivre ceux qui veulent avoir des interprétations çà et là, il faut rester à l’écoute du Gouvernement. Le Président a une certaine crédibilité et il respecte ses engagements. La réponse du Gouvernement va au-delà des soldes. Les questions de grades, de droit au bail y compris la question de leur avancement seront prises en compte. Vous avez raison ! »

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Paul Koffi Koffi : La réaction du ministère en charge de la Défense

[ Paul Koffi Koffi fait le point et annonce des mesures ] Depuis ce matin des éléments de certaines unités militaires ont fermé l’accès des casernes pour demander l’examen de leurs préoccupations. Le Président de la République , informé de la situation, a demandé qu’un examen diligent soit fait afin d’y apporter des solutions.
En conséquence, les décisions suivantes ont été arrêtées :

1. Les arriérés de solde des 476 ex-fds seront apurés pour moitié fin novembre 2014 et pour moitié fin décembre 2014;

2. Les arriérés de frais de déplacement des militaires seront apurés pour moitié fin novembre 2014 et pour moitié fin décembre 2014 ;

3. Le droit au bail pour les 8400 caporaux leur est accordé à compter du 1er janvier 2015, conformément aux dispositions en vigueur. Les éléments sont appelés à constituer leurs dossiers.
En ce qui concerne leur solde, le Chef de l’État a instruit le Ministre chargé de la Défense de recevoir immédiatement une délégation de militaires en vue de faire des propositions au Conseil National de Sécurité afin d’apporter une solution définitive à cette question.

4. Les allocations des ressources pour couvrir les frais de santé seront accrues afin de permettre à tous de se soigner décemment ;

5. Pour la formation et les avancements des caporaux l’État-Major des FRCI devra mettre en œuvre un programme afin de faciliter la promotion aux grades des caporaux.
En attendant, il est demandé aux militaires de regagner leur poste.
Le Ministre auprès du Président de la République chargé de la Défense }

L’histoire reste définitivement un témoignage et le temps est le second nom de Dieu.

Une présentation de Charles Kouassi

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