Culture

Santé en Côte d’Ivoire : Littérature et journalisme s’unissent pour dénoncer avec François M’Bra

Dans ‘’Au-delà de l’épreuve’’, son premier roman publié en 2024 aux éditions Papyrus, le journaliste et écrivain ivoirien François M’Bra II offre bien plus qu’une simple fiction. Il signe une véritable fresque sociale où l’écriture devient à la fois arme et miroir d’une réalité troublante.

Une récente étude critique du Dr Oulaï Koatéhi Natem, enseignant-chercheur à l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan, révèle comment l’auteur excelle dans l’usage de l’hypotypose, cette figure de style qui transforme la description en expérience visuelle immersive. Résultat : un texte qui transcende les frontières du littéraire pour interroger les enjeux de société et du développement durable. L’extrait analysé situe l’action au Centre Hospitalier Universitaire d’Ivoirekro, au cœur du pays. On y découvre une scène d’une intensité poignante : des patients épuisés couchés à même le sol, des poubelles débordant d’ordures, des moustiques tournoyant sans gêne, un service gynécologique à l’abandon…

livrée à un combat pour la vie

 

La précision des détails visuels et auditifs, qui évoque davantage le cinéma que la littérature, plonge le lecteur dans l’angoisse et la désolation aux côtés de N’djabian, attendant fébrilement des nouvelles de son aimée Enoubla, livrée à un combat pour la vie.

Une tension entre les contraires

Ce qui frappe particulièrement dans cette œuvre, souligne Dr Natem, c’est la capacité du récit à jouer sur des binarités ouvertes et irrésolues : vie et mort, espoir et désespoir, hygiène et insalubrité.

Cette tension reflète la complexité d’une condition humaine et sociale fragilisée, mais aussi l’illusion d’un système hospitalier censé soigner, devenu au contraire foyer d’aggravation et de souffrance , un miroir cruel de la faillite institutionnelle. La force de Au-delà de l’épreuve réside aussi dans sa dimension cinématographique. La narration progresse comme une caméra : du plan d’ensemble au gros plan émotionnel sur N’djabian. Ce travail sur le regard mobilise le lecteur, désormais spectateur d’une tragédie à la fois intime et collective.

Mais l’œuvre porte aussi la marque du journaliste. En effet , François M’Bra II, journaliste d’investigation de formation, y injecte la rigueur documentaire et la précision factuelle propres à son métier. Cette alliance entre journalisme et littérature enrichit l’écriture d’un engagement social concret, appelant à la prise de conscience des pouvoirs publics comme de la société tout entière. L’étude du Dr Oulaï K. Natem voit dans ce roman un cri littéraire contre la dégradation des systèmes de santé, mais aussi une invitation à un développement durable humain et éthique.

Améliorer les conditions sanitaires, rappelle-t-il, c’est œuvrer pour la dignité et l’épanouissement des populations africaines. Au fil des pages et au-delà, l’épreuve nous rappelle que la puissance de la littérature réside aussi dans sa capacité à ruiner le monde tel qu’il est, pour ouvrir la voie à ce qu’il pourrait devenir.

Un message fort, profondément actuel, qui résonne avec les défis de nos États africains.

Nambacéré Joël

 

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